Téléconsultation : une vague d’optimisme

Le 24 septembre dernier s’est déroulé notre 9e café healthtech consacré au bilan de la téléconsultation un an après la mise en place du remboursement. retour sur ce petit-déjeuner conférence animé de débats et d’échanges.

La téléconsultation a pris un nouvel essor avec le déploiement du remboursement par l’Assurance Maladie des téléconsultations via le parcours de soin en septembre 2018. Un an après, les objectifs annoncés n’ont pas été atteints mais on observe une dynamique positive du nombre de téléconsultations.
Pour débattre des différents enjeux et répondre aux questions relatives à ce lancement à l’occasion du Café HealthTech du 24 septembre dernier, Techtomed a invité François Lescure, Président de Médecin Direct et de l’association LET (Les Entreprises de Télémédecine), et le Dr Alexandre Maisonneuve,Directeur Médical de la plateforme de téléconsultation Qare.
Les débats et échanges ont permis de dresser un premier bilan et d’exposer des pistes d’améliorations pour démocratiser et développer davantage la téléconsultation.

Un bilan chiffré en-dessous des attentes mais une dynamique positive

Un an après son remboursement par l’Assurance Maladie, « la téléconsultation s’installe progressivement comme une nouvelle modalité de prise en charge des patients » indique la Caisse Nationale de l’Assurance Maladie. Depuis son lancement le 15 septembre 2018, la CNAM estime à plus de 60 000 le nombre de téléconsultations remboursées au 15 septembre 2019, sur l’ensemble du territoire. Des résultats en-dessous des attentes, les prévisions tablant sur 500 000 téléconsultations en 2019.
A noter que sur ces 60 000 téléconsultations remboursées, 40 000 ont été réalisées via la plateforme Doctolib qui bénéficie de sa notoriété auprès du grand public et de son maillage territorial.

Sur la même période, on enregistre près de 500 000 actes de téléconsultation dont une grande partie hors parcours de soin (en grande partie via les plateformes de téléconsultation BtoC et aux payeurs privés).

François Lescure et le Dr Alexandre Maisonneuve confirment que, malgré ces résultats décevants, la dynamique depuis plusieurs mois est bonne. En effet le nombre de téléconsultations remboursées chaque mois est en constante augmentation avec une accélération depuis le début de l’année 2019 (10 000 téléconsultations mensuelles depuis l’été). « Le niveau de satisfaction des Français ayant eu recours à la téléconsultation est bon. On observe d’ailleurs que la plupart des téléconsultés réutilisent ce service » indique François Lescure.

« De plus, les actes de téléconsultations enregistrés au cours de l’année ont permis d’éviter environ 100 000 passages aux urgences, générant des économies non négligeables, selon une enquête réalisée auprès des utilisateurs » indiquent François Lescure.

Si l’on dresse un portrait-robot du téléconsulté, on s’aperçoit que cela touche principalement des personnes jeunes le plus souvent en milieu urbain :

  • 1/3 des patients ont moins de 30 ans et 56% moins de 40 ans
  • Une majorité de femmes (64%)
  • 12% des patients avaient toutefois plus de 70 ans
  • 27% des patients étaient en ALD
  • L’Île-de-France comptabilise 44% de l’ensemble des téléconsultations

Création de l’association des Entreprises de Télémédecine (LET) pour promouvoir la télémédecine en France

L’association LET a vu le jour en janvier 2019 à l’initiative d’une vingtaine de sociétés impliquées dans la télémédecine, et plus particulièrement dans la téléconsultation. L’objectif pour François Lescure, Président de l’association, est de « contribuer au déploiement d’une médecine à distance accessible à tous, à la fois déontologique, performante et complémentaire à la médecine présentielle à travers le partage d’expériences et la coopération de l’ensemble des acteurs du secteur ».

Les premiers objectifs de l’association ont pour but de contribuer à :

  • Participer à une réponse concertée face aux problématiques d’accès aux soins
  • Promouvoir et favoriser les usages de la télémédecine au travers de l’information et de la formation de tous les acteurs (patients et professionnels de santé)
  • Apporter un éclairage pratique des usages et améliorer les connaissances du secteur par un partage de données utiles
  • Établir et faire adopter une charte de qualité et de déontologie par les adhérents du LET

L’association représente une grande partie des acteurs de la téléconsultation, permettant d’être écoutée par les pouvoirs publics sur les problématiques autour de la téléconsultation notamment sur les axes d’améliorations et l’assouplissement du cadre de remboursement. « Des discussions ont été entamées avec Nicolas Revel et la CNAM pour l’assouplissement du cadre de remboursement » souligne François Lescure.

Nouvel élan avec la téléconsultation en officine

La pharmacie bénéficie aujourd’hui d’un maillage territorial intéressant pour déployer la téléconsultation en France. La téléconsultation en officine est entrée officiellement en vigueur le 2 septembre 2019 avec l’avenant 15.
Concrètement, chaque pharmacie peut proposer un service de téléconsultation dans le respect du parcours de soins coordonné du patient avec un médecin traitant ou un médecin connu du patient. Les pharmacies doivent s’équiper d’un certain nombre de matériel (une visioconférence, un stéthoscope connecté, un otoscope connecté, un oxymètre et un tensiomètre) et disposer d’un espace de confidentialité.

« C’est une réelle opportunité pour certaines régions faisant face à une pénurie de médecin. S’il n’y a plus de médecin, la pharmacie est amenée à disparaitre » souligne François Lescure. « Mais le déploiement sera progressif car aujourd’hui les pharmaciens ne sont pas suffisamment équipés ni formés à la téléconsultation » indique le Dr Alexandre Maisonneuve.

A noter que les pharmacies devront probablement s’adosser à des entreprises de téléconsultation pour mettre à disposition des médecins disponibles à tout moment. Déjà certains groupements ou distributeurs s’organisent en ce sens. Il reste à savoir si le financement du matériel nécessaire à la pharmacie ne sera pas un frein majeur au regard des montants à engager.

Vers une évolution des modalités de téléconsultation

Dans les évolutions des modalités actuelles, l’intelligence artificielle peut apporter des optimisations notamment dans la partie de l’anamnèse où l’outil va recueillir le motif de la consultation, les indications importantes au diagnostic et traduire ensuite le ressenti du patient et les symptômes mentionnés en terminologie médicale. Des expérimentations sont menées mais sans déploiement à grande échelle pour le moment.

On observe également quelques tendances à suivre :

  • Le déploiement de la téléconsultation dans les CPTS « Un des objectifs des CPTS est de coordonner le parcours de soin et de faciliter la relation entre l’ensemble des professionnels de santé. La téléconsultation apparaît comme une solution pour l’accès au soin» souligne le Dr Alexandre Maisonneuve.
  • Un attrait des médecins retraités

Du côté des médecins on observe une appétence de la téléconsultation par les médecins retraités qui souhaitent apporter leur expérience clinique et se créer une rémunération complémentaire.

Même si les premiers résultats sont en-deçà des objectifs initiaux, tous les intervenants s’accordent pour dire que la dynamique est positive et que les optimisations à venir permettront de faire décoller la téléconsultation en France. Une vague d’optimisme !

Rémy Teston
Expert
Buzz E-santé

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